Plinio Corrêa de Oliveira

 

La sainteté véritable est

force d'âme et non

mollesse sentimentale

 

 

 

 

Aperçu, Paris,  n° 6, sep/oct. 1986, page 2 (*)

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L’Eglise enseigne que la sainteté véritable et entière est dans l’héroïsme de la vertu. L'honneur des autels n’est pas accordé aux âmes hypersensibles, faibles, qui fuient les pensées profondes, la souffrance poignante, la lutte, en un mot la Croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Fidèle à cette parole de son Divin Fondateur, « le Royaume des Cieux est aux violents », l’Eglise ne canonise que ceux qui dans leur vie ont combattu authentiquement le bon combat, en s'arrachant l’œil ou le pied s'il causait scandale, et en sacrifiant tout pour ne suivre que Notre-Seigneur Jésus-Christ. En réalité, la sanctification demande le plus grand des héroïsmes, car elle suppose non seulement la résolution ferme et sérieuse de sacrifier sa vie s’il le faut pour rester fidèle à Jésus-Christ, mais aussi celle de la poursuivre longtemps ici-bas s’il plaît à Dieu, en renonçant à tout moment à ce qu'on a de plus cher pour ne s’attacher qu’à la volonté divine.

Une certaine iconographie, malheureusement très répandue, présente les Saints sous un jour très différent : des créatures molles, sentimentales, sans personnalité ni force de caractère, incapables d'idées sérieuses, solides, cohérentes, des âmes conduites seulement par leurs émotions, et par conséquent totalement inadaptées aux grandes luttes que la vie terrestre amène toujours avec soi.

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La figure de Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus a été spécialement déformée par la mauvaise iconographie. Des roses, des sourires, un sentimentalisme sans consistance, une vie douce, insouciante, des os en sucre et du sang de miel, voilà l’idée qu’on nous donne de la grande, de l’incomparable petite Sainte. Comme tout cela diffère de l’esprit vaste et profond comme le firmament, flamboyant et ardent comme le soleil, et cependant si humble, si filial, avec le quel on prend contact quand on lit Histoire d’une Ame.

Nos deux clichés présentent pour ainsi dire à deux « Thérèse » différentes et même opposées. La première n’a rien d'héroïque : c'est la petite Thérèse insignifiante, superficielle, mièvre, de l’iconographie romantique et sentimentale. La seconde est la petite Thérèse authentique, photographiée le 7 juin 1897, peu avant sa mort, survenue le 30 septembre de la même année. La physionomie est marquée par la paix profonde des grands et irrévocables renoncements. Les traits ont une netteté, une force, une harmonie que seules possèdent les âmes d’une logique de fer. Le regard parle de douleurs terribles, éprouvées dans ce que l'âme a de plus caché, mais en même temps il révèle le feu, l'élan d'un cœur héroïque, résolu à aller de l’avant coûte que coûte.

A contempler cette physionomie forte et profonde, comme seule la grâce de Dieu peut en former, on pense à une autre Face : celle du Saint Suaire de Turin, que nul homme n’aurait pu imaginer, et que personne peut-être ni oserait décrire. Entre la Face du Seigneur Mort, qui est d'une paix, d'une force, d'une profondeur et d’une douleur que les mots humains ne parviennent pas à exprimer, et la face de Sainte, Thérèse, il y a une ressemblance impondérable mais bien réelle. Doit-on s'étonner que la Sainte Face ait laissé son empreinte sur le visage et dans l'âme de celle qui en religion s'est appelée précisément Thérèse de l'Enfant-Jésus et de la Sainte Face ?


(*) Pour échapper à la mièvrerie de l’imagerie saint-sulpicienne et à la relecture ”cavalière” de la vie de Sainte Thérèse, cet article écrit en 1953 pour la rubrique ”Ambiances, Coutumes, Civilisations” du mensuel brésilien ”Catolicismo”, prend une singulière actualité. – Edité par Tradition Famille Propriété – TFP.


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