Tradition Famille Propriété:

 

trois piliers

 

de la civilisation chrétienne

 

 

Aperçu, Paris, novembre 1987, pages 8 et 9

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Combattre une épidémie, ce n'est pas seulement administrer des antibiotiques. C'est aussi tonifier les énergies de l’organisme attaqué.

Un anticommunisme à large vue ne se limite pas à réfuter les erreurs du communisme et à en dénoncer les manœuvres. Il s'attache aussi à raffermir les valeurs positives que celui-ci cherche à détruire. 

Tradition

Vingt siècles d’action religieuse et civilisatrice de l'Eglise ont accumulé dans nos âmes, dans notre société, des valeurs surnaturelles et naturelles, individuelles et sociales, inappréciables. Une longue continuité à travers les générations leur a donné toute la solidité propre aux grandes traditions.

Sauvegarder, répandre, proclamer nos valeurs chrétiennes, c’est servir le cœur de notre tradition nationale. 

Famille

Comme chacun sait, elle constitue la cellule de la société.

Elevé par Jésus-Christ à la dignité de sacrement, le mariage des époux chrétiens confère à la famille une stabilité, à l'autorité paternelle une dignité et une force, à l’amour maternel, à l’affection filiale et aux relations fraternelles une puissance de liaison qui élèvent l’institution familiale à sa plénitude.

Le proclamer, le diffuser de toutes les manières, c'est augmenter au maximum la résistance individuelle et sociale vis-à-vis du communisme. Car celui-ci veut pratiquement éliminer le mariage, démembrer la société familiale et faire triompher l’union libre. 

Propriété

La possibilité de se constituer un patrimoine, si modeste soit-il, et de le léguer à son épouse et à ses enfants est le meilleur facteur naturel de la créativité humaine.

Dans les sociétés où il n’y a pas de propriété, tout le monde est fonctionnaire du capitalisme d’Etat ou des petites collectivités micro-totalitaires rêvées par l’utopie autogestionnaire.

Le macro-capitalisme qui absorbe dans des entreprises-moloch le patrimoine individuel d'une foule de gens est un mal. Le capitalisme d'Etat est un mal bien pire encore, lui qui absorbe dans les mains du super-moloch étatique le patrimoine de tous. 

Pourquoi défendre aussi la Propriété ?

La nécessité de défendre la Tradition et la Famille est généralement bien comprise. Mais une intense propagande révolutionnaire qui date au moins de Jean-Jacques Rousseau et de Proudhon - « la propriété, c'est le vol » - a créé, même chez les non communistes, une certaine mauvaise conscience à l’égard de la propriété.

Les considérations ci-après montrent que la Tradition, la Famille et la Propriété sont trois principes indissociables et comment l'abandon du principe de la propriété privée serait une brèche fatale dans la muraille d’une société libre assiégée par le collectivisme.

Igor Chafarevitch, dans le Phénomène socialiste (éd. Seuil, 1977), met l'abolition de la propriété et de la famille au premier rang parmi les constantes du programme socialiste, « quel que soit le vêtement dont il s'affuble » (op.cit. p. 18). Avec de nombreux exemples historiques, il montre que : « les principes fondamentaux du socialisme sont :

- l’abolition de la propriété privée

- l’abolition de la famille

- l'abolition de la religion

- l'égalité et l'abolition de la hiérarchie dans la société » (op.cit. p. 229).

Un article du Monde (26/7/72) intitulé « Tradition, Famille, Propriété : la triple contestation des 'communautaires' », présente la pensée d'un précurseur de la Théologie de la Libération, Max Delespesse, sur cette trilogie à laquelle il a consacré tout un livre « Jésus et la triple contestation : tradition, famille, propriété » (Fleurus, 1972). Pour lui, « la tradition, la famille et la propriété sont en fait trois 'aliénations' fondamentales. Elles coexistent et se soutiennent par un jeu complexe de relations de toutes sortes. Il s'agit d'un bloc cohérent dont on ne peut séparer les éléments. » Il déplore que « l'Eglise se présente fréquemment comme la garante de la tradition, de la famille et de la propriété » et qu'un mouvement né en Amérique latine ait fait « de la défense de cette trilogie l’essentiel de son programme ».

De fait, le Magistère traditionnel de l’Eglise a toujours vigoureusement défendu ces notions fondamentales de l'ordre naturel et chrétien. Parmi les nombreuses encycliques qui traitent de la question, on trouve notamment dans Quod apostolici muneris, de Léon XIII, une défense approfondie de la famille et de la propriété face aux erreurs socialistes (Les Enseignements pontificaux : la paix intérieure des nations, Desclée, 1962, pp. 59 à 62).

La propriété privée peut être individuelle, familiale ou sociale. La Civilisation Chrétienne a remarquablement développé le caractère familial de la propriété. La Révolution française a exacerbé son caractère individuel, ouvrant la porte à tous les excès du libéralisme. La Révolution communiste a exacerbé son caractère social, pour aboutir à l’étatisation et donc à l’abolition de la propriété privée.

« Les communistes peuvent résumer leur théorie dans cette formule unique : abolition de la propriété privée » (Manifeste du parti communiste, Marx et Engels, 1848).

Cette abolition conduit à la négation de la personne, car nier à l'individu le droit de propriété, c’est lui refuser le droit de disposer des fruits de son travail comme il l'entend, autrement dit c’est nier son autonomie et sa liberté. La reconnaissance de la dignité personnelle de l'homme tient ferme ou croule selon qu'on lui reconnaît ou non le droit de propriété (cf. Pie XII, Al. au Congrès du Droit privé, 1948).

Nier la propriété familiale ou sociale, c’est également retirer aux familles et aux institutions privées, les conditions normales de leur existence et de leur épanouissement.

Famille et Propriété se conjuguent dans la notion d’héritage. Cette transmission familiale de la propriété est comme la trace matérielle d’une transmission d'ordre supérieur, qui est celle des biens spirituels et des biens culturels. Cette transmission, où la Famille joue un rôle privilégié et irremplaçable, c’est la Tradition. Chaque génération l’enrichit d'une nouvelle expérience et l'allège de ses scories. Sans elle, il n’y a pas d'authentique progrès. 

La tentation égalitaire : extrémisme qui menace la société moderne

Comme c’est habituellement au nom de l’égalité que sont menés les plus graves assauts contre la Tradition, la Famille et la Propriété, il importe de clarifier cette question :

Entre les inégalités monstrueuses du monde païen d’avant Jésus-Christ (esclavage, condition servile de la femme, etc.) et l’égalitarisme forcené des révolutions modernes, la TFP préconise l’harmonieux équilibre que seule la Civilisation Chrétienne a su apporter.

L'égalité complète est non seulement impossible à réaliser, mais elle n'est pas même souhaitable. Car, quoi qu’en pensent les égalitaires, elle constituerait une grave injustice.

Il serait injuste d'imposer l'égalité dans un univers où, pour les raisons les plus élevées, Dieu a créé un ordre de choses où tous les êtres sont inégaux - y compris, et surtout, l'homme *.

Selon l’enseignement de Saint Thomas, la diversité des créatures et leur harmonieuse gradation hiérarchique constituent en elles-mêmes un bien. Car elles permettent aux perfections divines de se reéter avec plus d'éclat dans toute la création **. Pour cette raison, dans un monde où toutes les créatures seraient égales, la ressemblance entre la créature et le Créateur serait éliminée dans la plus grande mesure possible.

Cependant, il ne faudrait pas en conclure que plus l’inégalité est grande, plus parfaite est la justice. Car Dieu n'a pas créé d'inégalités terrifiantes ou monstrueuses, mais au contraire des inégalités proportionnées à la créature et au bien de chaque être, et propre à l’ordonnancement général de la création.

Il ne faudrait pas non plus en conclure que toute inégalité est nécessairement un bien.

Tous les hommes sont égaux par leur nature ; ils ne diffèrent que par leurs accidents. Les droits de l’homme qui découlent du simple fait d'être homme (tels que le droit à la vie, à l'honneur, aux conditions nécessaires à une digne existence, au travail, à la propriété, etc.) sont les mêmes pour tous. Et les inégalités qui attentent à ces droits doivent être considérées contraires à l'ordre naturel établi par Dieu.

Cependant, toutes les inégalités accidentelles contenues dans ces limites, comme celles qui dérivent de la vertu, du talent, de la force, de la capacité de travail, de la beauté, de la famille, de l’éducation, de la tradition, etc., sont justes et en accord avec l’ordre naturel. 


Notes :

* Cf. Matt. XXV, 14-30; 1 Cor. XII, 28-31; St Thomas d'Aquin, Summa contra Gentiles, III, chap. 57.

** Cf. St Thomas d’Aquin, Summa contra Gentiles, II, ch. 45; Summa Theologica, 1a. 47, art. 2.


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