Chapitre IV

La «révolution effarante» dans les faits

 

1. Procès à toutes les gloires du passé espagnol

Tant que les Espagnols resteront pénétrés du souvenir des grandeurs et des splendeurs de leur passé chrétien, la révolution culturelle socialiste ne pourra atteindre son objectif de complète transformation du pays.

C'est pourquoi la propagande révolutionnaire s'efforce d'instiller chez les Espagnols un complexe d'infériorité vis-à-vis de leur Histoire. Détachés du contexte où ils ont vécu, dénigrés, déformés et rendus inexplicables, les saints, les héros et toute la geste de l'Espagne catholique sont l'un après l'autre mis sur la sellette.

L'un de ces saints n'est autre que l'Apôtre Saint Jacques, patron de l'Espagne. La télévision espagnole (TVE) le traite avec mépris comme un «mythe», pendant que le gouvernement supprime le jour férié attaché à sa fête[1].

La geste de la Reconquête est elle aussi mise en jugement. L'Espagne, au nom de la Foi catholique et en légitime défense, a expulsé l'envahisseur musulman après huit siècles de luttes héroïques. L'ex-mosquée de Cordoue, symbole éloquent de la Reconquête, transformée en Cathédrale par les vainqueurs, est spécialement visée par ce procès. Des cercles influents et nombreux, jusque dans le haut clergé, ne se réfèrent plus à elle autrement qu'à la «cathédrale-mosquée», expression à saveur de convergence et de faux oecuménisme[2].

Aujourd'hui, on en est à revendiquer – non seulement dans les milieux musulmans, mais aussi dans des cercles espagnols – la «dévolution» de cet édifice sacré aux musulmans. Dans le quotidien El Pais, Francisco Umbral s'exclame : «la mosquée est un scandale de cinq siècles». Il conclut que le douzième centenaire «sera le moment de faire la reconversion artistique, religieuse et historique de la mosquée, en la lavant de ses adhérences catholiques et impériales»[3].

On ne pouvait manquer d'accuser aussi les figures les plus caractéristiques de la Contre-Réforme. A ce titre, l'un des symboles historiques que l'on cherche à démolir est le roi Philippe II. Voyons un exemple.

A l'Escurial, s'est déroulé un acte solennel de réparation envers la Hollande pour la politique suivie par Philippe II dans les Pays-Bas, dans sa guerre contre l'expansion du protestantisme.

En qualité d'orateur de ce triste événement, et devant LL.MM. les Rois d'Espagne et la Reine de Hollande, l'ex-ministre des Relations extérieures, José Maria de Areilza, a présenté Guillaume le Taciturne, adversaire et traître de l'Eglise et de l'Espagne[4], comme un modèle d'homme d'Etat : «le prototype du gouvernant moderne, du politicien qui conduit l'Etat avec des critères de tolérance et de respect»[5].

A l'opposé, dans le même discours, Philippe II – que Sainte Thérèse d'Avila a appelé «le Saint Roi»[6] –, a été taxé de souverain intolérant, qui «a rempli de sang, de bûchers et d’échafauds les villes et les bourgs des sept provinces»[7]. Dans son zèle à diffamer ce grand monarque, Areilza a assumé sommairement la représentation de toute la nation : «Aucun Espagnol d’aujourd’hui n’approuve ni ne justifie cette accumulation de cruautés aussi inutiles qu'injustes»[8].

Un autre événement «réinterprété» est la conquête et l'évangélisation de l'Amérique. Déjà en octobre 1984, dans une émission de TVE où l'on faisait l'éloge de la colonisation anglaise en méprisant l'oeuvre espagnole, un professeur d'Histoire a affirmé : «ce que l'Espagne a fait là-bas, ce fut de tuer des hommes, d’effacer des cultures, d’imposer par la force sa langue et sa religion»[9]. Sans que le fait ait soulevé une indignation significative, TVE a pu ainsi tranquillement dénigrer la patrie espagnole, dans des termes qu'anciennement on n'entendait que dans la bouche de ses pires détracteurs étrangers.

Dans le même sens, le journaliste Horacio Senz Guerrero a dénoncé dans La Vanguardia l'existence d'un mouvement anti-hispanique, promu par des Espagnols à propos du Ve centenaire de la Découverte de l'Amérique. Selon ce qu'il a pu constater, d'ici 1992, on tentera de présenter la colonisation du Nouveau Monde comme un «comportement génocide des Espagnols en Amérique»[10].

Fidel Castro n'a pas perdu l'occasion de se joindre à cette campagne diffamatoire, en qualifiant le 12 octobre 1492 comme une «date funeste et néfaste», où «a commencé l’une des pages les plus honteuses de l’Histoire Universelle»[11].

 

2. Famille : destruction de ses fondements institutionnels et subversion au foyer

Les néo-révolutionnaires, qui veulent détruire tout ce qui reste encore de l'ordre social chrétien, ne pouvaient manquer d'attaquer la famille.

La famille chrétienne inspire aux enfants l'amour des inégalités légitimes, elle leur inculque le sens du devoir et l'habitude de la discipline; elle oriente leurs âmes vers la vertu et l'ordre, en les préservant de l'esprit de révolte, de l'égalitarisme et de l'anarchie.

Même en ces jours d'indéniable décadence, l'institution familiale est encore un obstacle à l'oeuvre de démolition de la révolution.

Le freudo-marxiste Wilhelm Reich, un des théoriciens de la révolution culturelle, qualifie la famille de «fabrique de structures mentales conservatrices» et de «creuset idéologique de l'ordre social»[12].

Ainsi, pour transformer la société, le socialisme a besoin de détruire la famille.

 

a) Avortement

Le PSOE est arrivé au pouvoir imprégné de cette doctrine contraire à la famille[13]. Dès les premiers mois, il fit approuver la loi de l'avortement[14]. Maintenant, il prépare l'opinion publique pour qu'elle accepte sans heurt la libéralisation complète mais progressive de celui-ci. Viendra ainsi le jour de l'avortement libre et gratuit. Il viendra sans à-coups, si on applique avec succès la stratégie socialiste de n'avancer que dans la mesure où le consensus social le permet.

 

b) Féminisme

En revendiquant les droits qui seraient refusés à la femme par l'actuel ordre de choses, le féminisme subvertit en réalité l'ordre des valeurs au sein de la famille et constitue un puissant facteur de désagrégation familiale. On ne s'étonne donc pas que la promotion du féminisme figure au programme du PSOE, soucieux de «libérer les énergies révolutionnaires».

D'après le PSOE, «l'idéologie dominante [impose] un modèle de comportement féminin qui lui est indispensable pour maintenir et transmettre des relations sociales basées sur la propriété privée et la cellule familiale»[15] (62). Le socialisme s'allie donc opérativement au féminisme, un des nouveaux mouvements «culturels» libérateurs attachés à éliminer cette oppression. C'est pourquoi, a-t-il affirmé au XXIXe Congrès, «le parti socialiste doit assumer comme son idéologie propre tout ce qu'il y a de libérateur dans le féminisme (...). Tout cela sans crainte de se rapprocher de positions qui à un moment donné pourraient apparaître comme très avancées (...) mais que nous savons justes et qui, peu à peu, sont assimilées par la société»[16]. Rappelons que les courants les plus actifs du féminisme espagnol, dont le PSOE se sent si proche, vont jusqu'à soutenir que «la famille doit disparaître totalement»[17].

 

c) Education sexuelle

Le PSOE a pour objectif la généralisation d'une «éducation sexuelle à tous les niveaux de l’enseignement (maternelle, primaire, etc.)»[18]. Il vaudrait mieux dire corruption morale, car cette pseudo-éducation a pour fondement un hédonisme radical : «la sexualité doit être considérée comme une dimension agréable, la communication humaine, indépendante de la reproduction. Par conséquent, il ne pourra y avoir libre accès au plaisir sexuel tant qu'il existera la crainte d’une grossesse non désirée»[19].

Les jeunes soumis à une éducation sexuelle de ce type seront-ils en condition de constituer des familles qui soient effectivement des piliers de l'ordre social ?

Les exemples ci-après permettent de comprendre où l'on en sera arrivé si cette éducation sexuelle se généralise à toute l'Espagne.

Dans le collège Pablo Picasso de Terrassa (Catalogne), un programme d'éducation sexuelle a été mis en route. Il commence à la maternelle, où les enfants des deux sexes doivent jouer et se rouler par terre ensemble «pour connaître les corps et apprécier les sensations de plaisir». Au long des cours, on explique tout ce qui concerne les méthodes contraceptives : «Pendant le programme, les enfants apprennent que les relations sexuelles sont faites pour jouir et que, si on ne veut pas être père ou mère, on peut l’éviter». Les professeurs de cette école considèrent que leur initiative constitue «une expérience libératrice»[20].

On voit aussi se répandre les cours d'éducation sexuelle extra-scolaire. La municipalité de Coslada, aidée par une «société sexologique» de Madrid, en a organisé un, qui faisait partie du Plan de la Jeunesse, comme «expérience» pour 700 élèves de 14 collèges. La journaliste Carmen Santamaria informe : «Les enfants adhéraient à une série de mythes sociaux de caractère réactionnaire, autour de la virginité, de l'homosexualité et de l'assujettissement de la femme au mâle (sic) dans le couple»[21]. Il s'agit donc d'imposer une nouvelle doctrine, qui détruise les «mythes» sur la pureté, la virginité, l'honneur, le péché contre nature, etc...

 

d) Centres diffuseurs d'une «morale» anti-familiale

La famille est attaquée aussi sous d'autres aspects. La fondation des Centres de Planning Familial et des Centres d'Assistance à la Femme ont été un pas initial important[22]. En plus de propager les méthodes contraceptives, ils fonctionnent comme de véritables temples d'une morale désaliénée et anti-familiale. Le personnel engagé pour ces centres, selon la résolution du XXIXe Congrès du PSOE, «devra avoir une orientation nettement féministe»[23]. Ainsi, même si elle est de grande compétence, une gynécologue non féministe ne sera pas admise... Où est passée la politique anti-discriminatoire du PSOE ?

Au prosélytisme individuel réalisé par ce type d'organismes s'ajoutent les incessantes campagnes que l'INSALUD et l'Institut de la Femme réalisent sur TVE pour apprendre l'emploi des diverses méthodes contraceptives. D'une part, ils en répandent l'usage et, de l'autre, ils habituent le public à la propagande immorale la plus scandaleuse.

 

3. Une école autogestionnaire pour transformer les mentalités. La démolition totale, mais «tolérante», de l'enseignement traditionnel

a) Une école contraire à la tradition, comme outil de transformation sociale

Le PSOE, d'après le livre Projet pour la réforme de l'enseignement, édité par le ministère de l'Education et de la Science en 1987, conçoit l'école comme un «instrument de transformation sociale». Ainsi la finalité éducative de l'école est détournée au profit de la révolution socialiste.

C'est pourquoi elle ne doit pas contribuer à perpétuer «la tradition, la continuité sociale et culturelle».

Le ministère dit plus loin que l'éducation socialiste ne sera plus le «reflet de la hiérarchie sociale», ni même ne devra reproduire des «valeurs et habitudes»... qui sont celles du passé chrétien ! Sa mission est d'une autre nature. Elle est de contribuer au «changement de la société», à la «libération d’energies transformantes» qui modifieront «son orientation et ses règles de vie commune»[24].

 

b) Egalité et relativisme

Le style actuel du PSOE, qui se prétend l'interprète souriant de la «majorité sociale progressiste», ne permet plus les affirmations brutales et sans fard. On ne dit plus comme Rodolfo Llopis, prédécesseur immédiat de Felipe Gonzalez à la direction du parti : «Il faut s’emparer de l'âme des enfants» et «révolutionner les consciences et les esprits»[25]. Selon le ministère de l'Education, l'objectif actuel du PSOE est de transformer l'enseignement en une école publique «pluraliste», «où l'on vit ensemble dans la tolérance et l’égalité»[26].

Il n'en sortira pas de marxistes classiques à la Lénine, Negrin ou Llopis. Le PSOE veut autre chose : des citoyens adaptés à une Europe hédoniste, égalitaire et sans barrières idéologiques. Dans cette ambiance, à mesure que se dissoudront dans les âmes les principes et les habitudes de la civilisation chrétienne, on verra dépérir les méthodes classiques d'enseignement basées sur la discipline, sur la structuration logique de la pensée, l'acquisition de convictions, etc. Cette transformation «silencieuse» fera triompher la révolution «effarante» et «tranquille» du PSOE. En effet, transformé en homme sans principes, l'Espagnol se laissera entraîner par son instinct de sociabilité et suivra un consensus général de plus en plus révolutionnaire.

Dans ces conditions, celui qui saura manipuler et diriger le consensus pourra mener l'opinion publique espagnole où il voudra.

 

c) L'école publique autogestionnaire

Selon les critères du PSOE, il ne doit pas y avoir d'écoles hiérarchisées. La direction de l'école doit être partagée entre les professeurs, les parents, les élèves, le personnel de service, etc. Le ministère de l'Education appelle cela «initier à la vie sociale et démocratique»[27]. Mais, en réalité, on marche vers une participation chaotique, où des personnes sans maturité ni compétence pourront interférer dans les décisions les plus importantes, comme le choix des programmes d'étude ou des orientations doctrinales. De plus, cette participation entraînera des disputes électorales, ce qui dans une école constituera facilement un autre facteur de désordre.

 

d) Exclusion de l'Eglise

L'Eglise est la grande absente du programme éducatif du PSOE. Celui-ci, fidèle à ses origines athées, travaillera à «la disparition progressive de l'enseignement privé», aujourd'hui majoritairement dans les mains d'institutions catholiques. Il compte promouvoir «l'enseignement laïc, en retirant les matières religieuses des centres et des programmes d’études»[28].

 

e) Lois autogestionnaires

La Loi Organique du Droit à l'Education (LODE), approuvée en 1983, impose un modèle de structure scolaire de type socialiste autogestionnaire. Au moyen des Conseils scolaires, la direction des écoles passe pratiquement aux mains des élèves et d'entités extra-scolaires. Les directeurs des établissements publics se transforment en simples exécuteurs des décisions dudit Conseil. Quant aux collèges privés, ils ne continueront à recevoir de subventions du gouvernement que s'ils passent avec lui un accord selon lequel ils acceptent les dispositions de la LODE. Autrement dit, peu à peu, l'enseignement privé tombera sous la totale dépendance de l'Etat[29].

La Loi de Réforme Universitaire (LRU), qui date aussi de 1983, a la même inspiration autogestionnaire. Commentant ses effets, Luis Garcia Moreno, président de la Fédération Nationale des Associations de Professeurs d'Université (FACU), a déclaré : «Nous assistons à la fin de l'Université (...) Nous préférons la voir fermée, plutôt que d’être comme maintenant un parc de diversion pour adolescents désoeuvrés». Tant le président de la FACU que son secrétaire, le professeur José Maria Hernando Huelmo, ont critiqué la «bureaucratisation croissante et les procédures électorales continuelles qui se déroulent à l'Université, rendant impossibles la recherche et l’enseignement»[30].

 

4. Objectif de la «démocratie morale» : l'immoralité complète

a) Un objectif «démocratique»: en finir avec les «tabous» et les «préjugés»

Pour le socialisme rénové, aussi surprenant que cela paraisse, les revendications sexuelles sont partie intégrante du mouvement général de démocratisation; c'est-à-dire de radicalisation de la liberté, égalité et fraternité dans tous les aspects de la vie. Selon cette conception, la trilogie révolutionnaire, menée à ses ultimes conséquences, conduit à l'anarchie, désignée par Marx et par d'autres théoriciens socialistes comme l'objectif final du communisme.

Renovacion, organe de la Fédération Nationale des Jeunesses Socialistes, transmettait déjà à ses lecteurs, en 1977, ces nouveaux critères d'analyse, qui peu de temps après allaient être propagés par le socialisme dans toute l'Espagne :

«L'Espagne puritaine (...) ne peut plus défendre ses immondes retranchements; (...) la conscience grandissante du droit que chacun a de disposer, fièrement, de son propre corps, droit qui, s’il n’est pas respecté, alors on ne peut pas parler de réelle démocratie, a signifié un affaiblissement considérable des tabous et des préjugés (...). Ainsi, nous avons assisté à ce processus, dont le peuple espagnol peut s'estimer satisfait : sous les drapeaux de la démocratie, et parmi les revendications sociales et régionales, apparaissent aussi ceux qui revendiquent pour les droits sexuels. Ce phénomène social espagnol est d’une telle ampleur, que toute personne contraire à l'avortement et aux contraceptifs, à l’éducation sexuelle et à la reconnaissance des enfants dits illégitimes, au divorce ou à l'homosexualité, est considérée comme suspecte si en niant ces droits elle se dit encore démocratique»[31].

Que se passera-t-il à l'avenir pour ceux qui s'opposeront par exemple à la légalisation de pratiques homosexuelles ? Seront-ils considérés comme suspects d'antidémocratisme ? Seront-ils tenus pour des ennemis de la liberté morale et sanctionnés avec la rigueur réservée aujourd'hui à ceux qui attentent à la liberté politique ? C'est ce que laisse entendre cette publication socialiste.

Comme propagande de cette doctrine anarchique et désaliénante, la revue encourage la pratique et l'exhibition d'actes sexuels sur les places et lieux publics. Renovacion voit avec sympathie l'existence des «commandos de l’amour», qui font des démonstrations publiques sur la célèbre place Puerta del Sol «pour que tout le monde, y compris les enfants, contemple l’acte d’amour», devant l'Eglise S. Francisco-el-Grande pour défendre «une morale sans religion et sans loi» contre «les moralistes du péché et de l'enfer», et devant l'Ateneo pour faire connaître la vraie démocratie[32].

 

b) Appui officiel à la corruption morale

¨ «Culture libératrice». En conformité avec ses doctrines, le PSOE soutient les manifestations «culturelles libératrices». Des pièces de théâtre comme Teledeum, Dimonis, Los Virtuosos de Fontainebleau ou Visanteta de Favara ont reçu un appui officiel. Ces pièces, objet d'une très grande publicité, prêchent cyniquement une morale libertaire et antirépressive, préfigure du monde que le socialisme veut créer.

Teledeum est une infâme parodie de la Sainte Messe ; Dimonis représente le triomphe des démons sur les anges ; Los Virtuosos de Fontainebleau mettent en scène une caricature grotesque de Notre-Dame du Pilar et Visanteta de Favara est une bouffonnerie blasphématoire et immorale sur le paradis où l'on se moque spécialement de Saint Vincent Ferrier.

Dans une analyse élogieuse de l'oeuvre obscène et blasphématoire Visanteta de Favara, la revue du Ministère de la Culture, El Publico, souligne que dans cette représentation «les tabous sexuels n’existent pas. (...) A Favara, chacun est libre de pratiquer des relations sexuelles sans être inquiété». La démarche de l'auteur, Albert Boadella, est ainsi présentée : «Albert a voulu (...) s'en prendre aux échafaudages judéo-chrétiens et continuer son jeu pyrotechnique contre l’obscurantisme». Comme élément de ce «jeu pyrotechnique» contre les «tabous», Boadella explique qu'il a voulu porter au théâtre la «saine obscénité» et l'esprit de «fête ludique» du peuple de Valence[33].

Des fêtes ludiques, telles ont été aussi les Ière et IIème Semaines de l'Erotisme, organisées par la municipalité socialiste de Madrid en 1984 et 1986, respectivement. Feu M. Tierno Galvan, en présentant la première, s'est attaqué aux principes de la morale chrétienne, en se référant avec mépris aux «préjugés caducs» et aux «dogmatismes sans portée»[34].

Lors de la IIème Semaine de l'Erotisme, fréquentée par 40.000 personnes, le cinéaste Luis Garcia Berlanga a eu cette phrase qui décrit bien ce que le socialisme est en train de mettre en vedette : «l’érotisme, c’est la pornographie habillée en Christian Dior». Pour l'inauguration de cet infâme spectacle, pendant que sur la scène se déroulait un «défilé de mode des sous-vêtements», les membres de l'assistance, hommes et femmes, rivalisaient en grossièretés et en obscénités[35]. Voilà l'ambiance «culturelle» stimulée par le PSOE...

Des représentations qui auparavant n'existaient que dans les antres clandestins de la corruption la plus abjecte se font maintenant sous le patronage d'organismes publics et sont considérées comme culturelles et modernes — quoique un peu extravagantes — par les grands moyens de diffusion.

D'ici peu, elles ne seront même plus considérées comme des faits extravagants. On les présentera comme normales. Le jour viendra-t-il où la décence devra se cacher pour survivre ?

¨ Dépénalisation de la consommation de drogue. La réforme socialiste du Code Pénal qualifie seulement de délit la culture, la fabrication ou le trafic de drogue. Mais elle a dépénalisé la préparation, le transport et la détention de toute drogue par son consommateur, en plus d'avoir allégé considérablement les peines applicables au trafic. Les conséquences ne se sont pas fait attendre : le nombre des toxicomanes a monté en flèche et les indices de délinquance également[36]. Le gouvernement socialiste a esquissé un pas en arrière qui a tranquillisé certains, mais qui n'a rien changé en pratique.

¨ Nudisme. En même temps, également avec les encouragements officiels, ou du moins sous le regard complaisant des autorités, le topless se répand sur les plages et les centres de nudisme se multiplient dans toute l'Espagne.

La publication de la Mairie socialiste de la capitale, Villa de Madrid, a salué la généralisation du monokini dans les piscines municipales comme une «saine et curieuse mode vestimentaire», qui se trouve «entre les plus hautes aspirations nudistes» (sic) et «la stricte pudeur»[37].

Cette municipalité a inauguré, en août 1986, le premier solarium nudiste de Madrid dans le centre omnisport de La Elipa, qui ne peut être fréquenté que par des personnes entièrement nues.

En 1987, l'expérience pilote s'est étendue à la piscine du quartier du Pilar. On parle déjà d'un projet semblable à la Casa de Campo. Les expériences de nudisme urbain s'étendent ainsi graduellement[38].

Le topless s'est à ce point généralisé sur les plages que le juge Gabriel Fiol Gomila, dans une sentence publiée dans la presse, a pu affirmer que «prendre le soleil en topless est un fait public et notoire sur toutes les plages du littoral méditerranéen»[39] (86). L'Espagnol commun, qui ne pratique pas encore le nudisme, s'habitue déjà à l'accepter avec naturalité[40].

Nous devons encore considérer un autre facteur. En plus de ses fonctions primordiales de protéger le corps et de garder la pudeur, l'habillement a une signification culturelle et sociale. Le vêtement symbolise d'une façon remarquable les valeurs de l'âme humaine. Il suffit de penser à la variété magnifique des habits ecclésiastiques, des uniformes militaires et des costumes originaux avec lesquels toutes les classes et les régions d'Espagne ont su traduire - en formes, ornements et couleurs - des qualités d'âmes propres à chacunes. On peut affirmer, dans ce sens, que, plus la culture d'un peuple est développée, plus la variété et l'expression symbolique de ses vêtements sont grandes. En sens inverse, à mesure qu'un peuple déchoit, il tend à les appauvrir et à les supprimer. L'étiolement du sens de la pudeur, qui ouvre la voie au nudisme habituel, n'est qu'une composante de cette dégradation humaine globale qui s'appelle barbarie. Le nudisme, en éliminant l'évidence la plus immédiate qui distingue un homme civilisé d'un sauvage, constitue un symbole de l'état de choses anarchique auquel aspirent les socialistes.

¨ Homosexualité. Pour le PSOE, l'homosexualité est «un aspect de plus de la communication interpersonnelle (...) une potentialité de jouissance et de libération que nous possédons tous». Pour en finir avec «la marginalisation sociale des homosexuels» (hommes et femmes), le parti s'est engagé à «assumer leur lutte revendicative»[41].

Il l'a en effet assumée. En 1983, la majorité socialiste a approuvé aux Cortes une réforme partielle du Code Pénal, où la nouvelle rédaction de l'art. 18, aux fins d'immunité familiale, assimile au conjoint les individus qui «se sont liés par une analogue relation d'affectivité». La réforme a dépénalisé également la stérilisation et la chirurgie transsexuelle (cf. art. 11, 18 et 428, modifiés par la Loi Organique 8/1983, du 25 juin).

Dans ces conditions, on ne s'étonne pas que des groupes d'homosexuels et de lesbiennes s'enhardissent à faire des revendications, des manifestations et des congrès publics. La barrière d'horreur qui les sépare de l'opinion publique tombe progressivement et celle-ci s'habitue à considérer tout cela comme des faits normaux de la vie quotidienne.

Développant cette tactique d'accoutumance progressive aux péchés contre nature, la presse a annoncé un jour la réunion à Madrid de collectifs homosexuels d'Andalousie, Baléares, Catalogne, Castille, Galice, La Rioja et Pays Basque, avec la participation du Collectif des Féministes Lesbiennes de la capitale[42]. En cette occasion, José Maria Torres, porte-parole du Front Gay du Pays Basque, a montré jusqu'où va l'interprétation du prétendu droit de disposer de son propre corps : «Quand nous parlons du droit de disposer de son propre corps, nous étendons cette revendication à tous les âges, y compris la relation sexuelle infantile avec des adultes tant qu'il n'y a pas violence ou tromperie»[43]. Peu après, des faits analogues se sont produits à Barcelone lors des Journées de Réflexion de groupes de lesbiennes. Le public a été informé par les journaux du déroulement des exposés, de l'existence de divers courants d'opinion, du lieu des réunions, etc., le tout sur un ton neutre, comme si c'était la chose la plus naturelle[44].

Dans le même sens, un quotidien connu a publié un long interview de Jordi Petit, coordinateur d'un certain Front de Libération Gay de Catalogne, comme on le fait pour un leader politique. Son programme consiste à «relativiser ce qui est masculin et ce qui est féminin, parce que le masculin et le féminin sont totalement arbitraires»[45].

On crée ainsi l'impression que dans une société pluraliste et en rapide modernisation (expressions à la mode) les homosexuels sont simplement une minorité marginalisée parmi tant d'autres, en faveur desquelles le socialisme lutte, dans son travail «antidiscriminatoire»[46].

L'immoralité et la grossièreté, en envahissant la vie quotidienne, provoquent nécessairement l'effondrement de la barrière que la moralité et le bon goût ont élevé entre le langage décent et l'argot. Des expressions grossières et viles font maintenant partie du langage habituel de nombreux milieux «modernisés».

¨ Le désir d'être noir. Aujourd'hui, la «modernité la plus absolue, c’est le désir d’être noir», soutient le journaliste Manuel Vicent. Il explique cette insolite affirmation : entre autres choses, il s'agit du langage des jeunes qui «ne parlent pas, se communiquent, et cela est purement noir». «Les noirs se tâtent, se poussent, se regardent, chantent, dansent et s’expriment avec le corps. Ils sont très physiques et leur culture est très puissante». Pour Manuel Vicent, les noirs s'expriment «avec le postérieur» et «cela, ça vient d'arriver en Europe, parce que le catholique anglosaxon ne donnait pas au c. la moindre importance»[47] [48].

Sous l'effet de la présence obsessive de l'immoralité, la vie quotidienne s'imprègne d'habitudes, de façons d'être et d'un vocabulaire au diapason de cette révolution culturelle. Une personne qui accepte la coexistence consensuelle et tolérante avec ces dégradations de toutes sortes jugera-t-elle nécessaire de défendre la moralité de la famille et son caractère hiérarchique et indissoluble ? N'assistera-t-elle pas dans l'indifférence à son effondrement ?

 

5. «Relativiser» la propriété, pour la collectiviser ensuite

a) Conserver l'écorce, en la vidant de son contenu

Il entre dans le caractère «tranquille» de la révolution «effarante» de mener une politique économique d'apparence modérée. Le PSOE se montre disposé à marcher quelque temps avec le capitalisme. Il déclare avoir laissé de côté les dogmes marxistes concernant l'étatisation et les expropriations en série[49].

A l'exception de la bruyante et encore énigmatique affaire Rumasa, il n'y a pas eu de grandes expropriations. Il n'existe pas de politique d'étatisation. Au contraire, un timide processus de privatisation est en cours.

Néanmoins, le droit de propriété est peu à peu relativisé et préparé à servir les desseins d'un Etat minutieusement dirigiste.

Lors de la rencontre de dirigeants socialistes tenue à Javea en 1985, Ramon Garcia Cotarelo a parlé de la tactique de la «relativisation fonctionnelle de la propriété privée qui, sans avoir de caractère expropriatoire, mettrait aux mains du socialisme un puissant instrument matériel» pour la réalisation de ses objectifs[50]. Dans le même sens, Ignacio Sotelo parle de l'intention socialiste de déplacer «la propriété privée de son pivot central»[51], quoique sans la transférer dans l'immédiat aux mains de l'Etat. Gregorio Peces-Barba préconise de «défondamentaliser» la propriété privée; autrement dit, il énonce la stratégie à suivre pour que celle-ci, dans une société de transition vers le socialisme, cesse d'être considérée ou même sentie comme un droit fondamental[52].

L'ex-secrétaire d'organisation du PSOE, Carmen Garcia Bloise, a été encore plus claire : «l'objectif final du parti reste toujours la transformation de la société, mais nous pensons qu'il faut la transformer par des réformes progressives. C'est une simple question de rythme»[53].

Dans cette politique d'érosion graduelle du droit de propriété, le PSOE prend soin de ne pas réveiller les Espagnols de leur assoupissement. Mais il leur fait sentir que la condition de propriétaire, aussi bien dans la législation que dans la vie économique, a chaque fois moins d'effets pratiques.

 

b) Habituer le propriétaire à la condition de gérant

Cette façon d'agir est précisément celle qu'emploie la techno-bureaucratie socialiste. En utilisant des concepts vagues comme «modernisation» et «rentabilité sociale», elle retranche progressivement aux propriétaires la capacité de disposer librement de leurs biens. Au bout d'un certain temps, les propriétaires se seront transformés en simples exécuteurs des ordres du Pouvoir public.

Quand les propriétaires se seront habitués au dirigisme étatique, les expropriations les heurteront beaucoup moins, car dans l'ordre des faits concrets ils se sentiront très peu maîtres de ce qu'ils possèdent et auront perdu la notion de ce que la propriété existe primordialement pour son détenteur, comme l'enseigne la doctrine catholique et le droit naturel[54].

Ce processus de relativisation de la propriété est en cours d'application avec les réformes agraires d'Andalousie, Estrémadure et Aragon. Les gouvernements de ces trois autonomies peuvent manoeuvrer légalement des critères techniques et des indices de productivité pour transformer les propriétaires en de virtuels fonctionnaires de l'Administration, en les obligeant à suivre leurs directives sous la menace d'impôts progressifs ou même de l'expropriation[55].

Une autre forme de relativisation de la propriété est contenue, par exemple, dans la Loi des Eaux, du 2 août 1985, qui déclare dans son préambule «bien du domaine public de l'Etat» les eaux souterraines. Les concessions d'usage de l'eau ne vaudront que pour une durée déterminée et restent sujettes aux directives de l'Administration publique et à l'expropriation forcée, en fonction des exigences des Plans Hydrologiques[56].

Aux Canaries, une loi semblable a été approuvée. Elle a provoqué de vives réactions et la défaite électorale des socialistes dans cette autonomie.

 

c) Les premiers pas de l'autogestion

Le PSOE place «le principe de l'autogestion comme base de l'organisation de la future société socialiste». Son but de «transformation de la propriété individuelle et corporative des instruments de travail en propriété collective, sociale ou commune»[57] passe par la généralisation de la gestion ouvrière directe et non plus par l'étatisation, qui était la voie normale du collectivisme employée par le socialisme classique.

La cogestion dans les entreprises publiques est déjà un premier pas en direction de l'autogestion.

L'art. 21 de l'Accord Economique et Social (AES) – pacte tripartite entre le Gouvernement, l'entreprise privée et les syndicats, signé en 1984 – a mis en route la cogestion ouvrière dans les entreprises publiques. Une convention entre le gouvernement et le syndicat socialiste Union Générale des Travailleurs (UGT) a déterminé ensuite l'élection des représentants syndicaux à la direction des entreprises de l'Etat, selon un critère de proportionnalité qui a surtout profité à l'UGT et au syndicat communiste Commissions Ouvrières (CCOO).

José Luis Daza, de l'UGT, demande que la prochaine étape soit d'étendre la représentation syndicale aux organes directeurs des entreprises privées. Il a été appuyé par Joaquin Almunia, ministre du Travail, qui a ainsi annoncé la poursuite de la politique socialiste : «Il est souhaitable que cette mesure déborde de l’entreprise publique et s’introduise dans le secteur privé, par la voie des négociations de conventions collectives»[58].

Plus explicite, l'économiste de l'UGT, Francisco Lopez Romito, dans la revue Tecnicas y Cuadros, éditée par le syndicat socialiste, révèle une fois de plus la tactique progressive du PSOE en disant que la participation syndicale dans l'entreprise publique «s'inscrit dans un processus d’élargissement graduel de la participation [ouvrière] dans la planification et la gestion économiques».

Ce contrôle syndical croissant tendra à couvrir toute la vie économique, selon le plan exposé par cet économiste de l'UGT : «La mise en marche de cette expérience constituera une influence positive en direction des entreprises publiques des communautés autonomes et municipales, ainsi que vers l'ensemble des entreprises privées»[59].

 

6. Désagrégation de l'Etat vers une confédération de communes autogestionnaires

a) Le régionalisme, écrasé hier, exploité aujourd'hui

Depuis la Révolution Française jusqu'à récemment, les courants révolutionnaires considéraient le régionalisme comme une manifestation obscurantiste et primitive d'attachement au terroir et à des traditions périmées. Ils croyaient que le progrès cosmopolite finirait par homogénéiser les nations, en les rassemblant sous un gouvernement mondial.

Ce tableau a subi un changement fondamental. Les secteurs les plus aggiornati des divers courants révolutionnaires, mis en vedette par les media, ont assumé les anciennes revendications régionalistes, quoique sans renoncer à l'idée d'une république universelle.

Que s'est-il passé ?

Les forces favorables à l'autogestion ont commencé à utiliser les fameuses minorités ethniques comme des facteurs de désagrégation de l'Etat et de la société[60]. Dans la pratique, elles s'efforcent d'inclure ces minorités dans l'ensemble des mouvements sociaux et culturels anarchisants mis en marche à partir de mai 68. Pour cela, elles cherchent à insérer peu à peu les revendications et les aspirations régionalistes au sein d'un courant d'hostilité tempéramentale et idéologique qui commence à se manifester contre les excès du centralisme étatique et se transforme petit à petit en un rejet de la notion même de l'Etat.

Plusieurs facteurs sont au service de cette stratégie.

 

b) Une Constitution à «toit ouvert»

Quand la Constitution Espagnole de 1978 a établi les Statuts d'autonomie (par lesquels les gouvernements régionaux ont acquis une grande marge d'indépendance par rapport au pouvoir
central), le PSOE a travaillé pour que cette situation ait des limites peu claires. Il a voulu une  Constitution ambiguë et flexible qui permette un processus d'autonomisation à toit  constitutionnel ouvert[61]. C'est-à-dire que la nouvelle organisation de l'Etat espagnol ne  devrait pas être conçue comme les fédérations en vigueur dans plusieurs pays européens et américains. Il y est arrivé. Gregorio Peces-Barba, représentant socialiste à la Commission de Rédaction de la Constitution, a affirmé que «l'option indépendantiste tient dans la Constitution»[62].

En établissant l'autonomie des provinces d'une manière ambiguë, on a ouvert une voie dont les extrêmes se perdent dans les brumes de l'indéfinition du texte constitutionnel.

 

c) Donner l'impression d'un appui populaire

Naturellement, pour désagréger l'Etat et la société, une action révolutionnaire ne peut s'appuyer seulement sur l'ambiguïté des textes constitutionnels. Il lui faut donner l'impression d'avoir un grand appui populaire et d'avancer comme sous l'effet d'une poussée irrésistible.

Pour démanteler l'Etat au profit d'une confédération autogestionnaire, comment éviter que la majorité se réveille, raisonne, discute et demande des explications ? Comment démonter l'unité politique de l'Etat espagnol sans déclencher de tensions, tout en favorisant une pression révolutionnaire apparemment irréversible ?

La réponse nous est donnée par les faits :

¨ Le terrorisme blanc. Une minorité de dirigeants et d'agitateurs sans appui populaire peut suffire – quand l'opinion publique est endormie – à produire l'illusion qu'une révolution est en gestation dans les entrailles de la société civile.

On crée déjà cette illusion au moyen de la symbolique guerre des drapeaux (des groupes séparatistes brûlent le drapeau espagnol ou empêchent qu'il soit arboré sur les édifices publics) ou avec les graffitis injurieux pour l'Espagne dans tous les points du Pays Basque ou de la Catalogne. Ou avec les slogans indépendantistes en dialecte pour les Asturies; en arabe pour l'Andalousie; ou, faute de mieux, en argot pour l'Aragon. Le show indépendantiste sait même tirer parti du football, quand il exagère artificiellement les disputes entre les supporters d'équipes basques ou catalanes.

Au milieu de tout cela, le chef du gouvernement basque prend possession de sa charge sans attendre le décret royal ni jurer la Constitution. Sans la moindre sanction ni conséquence...

Ces faits sont-ils l'expression d'un légitime et sympathique souhait d'affirmation régionaliste ? Évidemment non. L'Espagnol moyen regarde autour de lui et, ne trouvant chez ses leaders naturels personne pour lui donner une explication complète, se sent pris par un malaise indéfini.

Après cette inquiétude initiale, il est assailli par un doute quant à la portée réelle de ces tensions, car elles n'ont généralement pas de conséquences concrètes immédiates. Finalement, il s'habitue à vivre dans une situation d'instabilité chronique, qu'il considère comme précaire et incertaine.

¨ Le terrorisme sanglant. Des forces qui semblent avoir des objectifs et des méthodes très divers se complètent dans l'ordre des faits concrets. Dans une vue d'ensemble, le terrorisme blanc comme le terrorisme sanglant apparaissent comme les deux versants qui collectent les eaux d'un même fleuve révolutionnaire. Le terrorisme blanc crée l'apparence d'un mécontentement populaire sur le point d'éclater et il évite ainsi que le terrorisme sanglant soit vu comme émanant d'une simple minorité de fanatiques isolés. De son côté, l'Organisation Terroriste Basque (ETA) joue le rôle d'un secteur plus exalté du prétendu mécontentement populaire profond et généralisé, qui ne s'arrêtera pas tant qu'il n'aura pas atteint ses objectifs. Ceux-ci sont d'ailleurs présentés comme licites et loués par d'importantes autorités ecclésiastiques et politiques.

De plus, les méthodes cruelles et lâches de l'ETA confèrent une apparence de modération aux excès du terrorisme blanc.

 

d) L'Europe des Peuples

Fédéralistes, autonomistes exacerbés et indépendantistes se rejoignent sur un même objectif : la formation d'une macro-unité de faible cohésion, l'Europe des peuples (ou selon une version moins radicale, l'Europe des régions), avec un régime autogestionnaire généralisé, depuis l'Atlantique jusqu'à l'Oural.

Le Parti Nationaliste Basque (PNV) a fait sien cet objectif dans une résolution de l'un de ses congrès. L'«Europe des Peuples libres» doit être «globalement démocratique» et «inspirée par un esprit égalitaire», au sein d'un ordre socialisé. Une Europe unie «sous un toit structurel commun politique et économique» permettra de dépasser les Etats actuels et d'opérer une «convergence des systèmes politico-sociaux», autrement dit des systèmes capitaliste et communiste[63].

En même temps, le président du Gouvernement de l'autonomie de Catalogne, Jordi Pujol, parle de l'«Europe des Régions». La devise ambiguë de son parti Convergence et Union, la Catalogne est une nation prend une étrange tonalité quand Pujol déclare en Israël : «Dans le sionisme, il y a des faits qui, dans la perspective nationaliste, sont très intéressants et sous certains aspects sont transférables à beaucoup de mouvements nationalistes»[64]. Ou encore quand il est allé en Argentine en qualité d'invité d'honneur du Président Alfonsin, accompagné de 1.200 personnes et avec des airs de chef d'Etat, pour présider à la commémoration du centenaire de la Maison Catalane[65]. Ou, enfin, quand il a réclamé la présence d'une représentation des communautés autonomes auprès du Marché Commun européen, qui soit indépendante de la représentation diplomatique espagnole[66].

Dans la perspective socialiste, Felipe Gonzalez affirme : «l'Europe n'a pas d'avenir si elle n'est pas capable de se changer en une réalité politiquement unitaire (...) L'avenir de l'Europe, comme celui du socialisme, dépendent (...) de la création en Europe d'un climat de détente (...) une Europe sans tensions militaires pourrait être le point de départ d'une intégration économique entre l'Est et l'Ouest, et pourrait être en plus la base d'une croissante démocratisation des pays de l'Est. Il est encore facile de dire aujourd'hui que les réformes de Gorbatchev sont limitées (...) mais personne ne peut prévoir jusqu’où conduira la dynamique que ces réformes mettent en marche»[67].

 

e) La dissolution de l'Etat en micro-nationalismes

A Gérone, un congrès promu en 1983 par la municipalité socialiste a réuni la crème de l'intelligentsia de gauche. Dans ce congrès, on a pu entrevoir ce que serait l'Espagne du XXIème siècle en cas de victoire des courants révolutionnaires. Les consignes indépendantistes ont abondé. Le philosophe anarcho-socialiste, Savater, les a résumées ainsi : «On ne peut réprimer l’existence d'un séparatisme basque, catalan ou canarien. Quatre-vingts pour cent des basques se sentent indépendantistes.

Le Pays Basque et la Catalogne ne se sont jamais sentis authentiquement Espagne, mais des prisonniers de l'Espagne, des colonies de l'Espagne, des victimes de l'Espagne».

L'intellectuel José Luis Lopez Aranguren s'est montré le plus connaisseur des vents révolutionnaires. Dans une ambiance dominée par l'affirmation autonomiste et l'indépendantisme, il a dit sans soulever la moindre protestation : «Un jour viendra où l'on prendra un peu comme une plaisanterie le drapeau espagnol, le catalan ou le basque. Ce sera le moment où l’on passera des nationalismes du dix-neuvième siècle aux micro-nationalismes du vingt-et-unième». «On va arriver à la dissolution de l'Etat national. C’est dans la marche de l'Histoire»[68].

 

f) Vers une république universelle d'un genre nouveau

Deux ans après, parlant à Paris lors du VIIe Séminaire International de l'Institut Socialiste d'Etudes et de Recherches, l'ex-dirigeant du PCE, Manuel Azcarate, a tracé avec plus de netteté la même perspective : «Un progrès social exige une diminution de l'Etat national par le haut, vers l’entité politique européenne», qui serait «l'Europe des peuples, sans aucun doute, mais aussi l'Europe des régions, l'Europe des villes, l'Europe des entités autogérées». Il conclut : «Parler d'Europe culturelle sans l'Union Soviétique, et même sans les Etats-Unis, sans l'Amérique Latine, est-ce possible ?»[69].

 

7. Terrorisme du blasphème et du sacrilège

Il manquait une pièce pour compléter le puzzle de la révolution culturelle, qui accompagne les révolutions politique, sociale et économique : la sinistre prolifération des offensives directes contre Dieu, sa Très Sainte Mère et la Religion Catholique.

On assiste aujourd'hui en Espagne à une interminable succession de festivals burlesques et irrévérencieux, d'expositions sordides et d'oeuvres «d'avant-garde» de toutes sortes, qui bénéficient du soutien, ou au moins de la tolérance des autorités socialistes, et qui ont pour résultat l'introduction progressive du blasphème comme ingrédient «culturel» de la vie quotidienne en Espagne.

 

a) Une forme nouvelle de blasphème et de sacrilège

Le blasphème et le sacrilège nouvelle vague n'ont pas les mêmes caractéristiques que dans le passé. Ils n'apparaissent pas comme les expressions furibondes d'une haine doctrinale et sectaire.

Le blasphème aggiornato est relativiste. Il se présente sous un jour festif, anodin et comme l'explosion d'un désir de libération, en consonance avec l'insouciance tolérante, irénique et accommodante qui domine la vie politique actuelle et qui est nécessaire à la néo-révolution socialiste. Il prend donc l'aspect d'une moquerie ludique du sacré.

Un exemple caractéristique a été l'affiche qu'a fait imprimer en 1986 le district madrilène de Chamberi, pour les fêtes traditionnelles de Notre-Dame du Carmel du 11 au 16 juillet. Elle représentait une femme à lunettes, les sous-vêtements apparents et à moitié défaits, portant un pantalon rayé et flottant en l'air dans une position qui rappelait la Vierge du Carmel. A ses pieds, à terre, une femme nue et un être, mi-singe mi-démon, lançant un éclat de rire sardonique.

Devant le malaise généralisé causé par cette offense gratuite et brutale à l'une des dévotions mariales les plus populaires, Pilar Fernandez, présidente du conseil municipal de Chamberi, a expliqué avec effronterie : «Il ne faut pas prendre cela au tragique, il s'agit d'une représentation ludique de la Vierge»[70].

 

b) Le blasphème comme instrument pédagogique de la révolution culturelle

Dans Dimonis, oeuvre fortement soutenue par le gouvernement socialiste[71], on utilise ouvertement le blasphème comme un instrument pédagogique de la révolution culturelle. Selon la revue El Publico, du Ministère de la Culture, le «démon méditerranéen» (personnage de la pièce de théâtre) est «un faune des âmes qui (...) remet frénétiquement en question tous les tabous établis par les conventions que notre société a secrétées». Les acteurs ont une «intention désacralisante» et sont «ludiques», «énormément subversifs»[72].

Les cris de «vive notre enfer!», «mort à Dieu!», «mort à l'Eglise!», «ni frontières, ni police, ni curés!»[73] ne sont pas présentés comme des actes d'adoration formelle au démon ni comme l'expression d'un anticléricalisme classique dans le style des ferreradas de 1909 ou des troupes socialo-communistes de la Guerre Civile. Selon l'accueil euphorique que leur a fait Cita en Sevilla, revue de la municipalité socialiste de cette ville, ce serait plutôt des explosions d'esprits irrespectueux, «insolents et provocateurs», qui font sentir au public «l’acidité corrosive des feux follets, la lucidité brillante de l’impudence»[74].

Durant les représentations de cette pièce, véritables cours d'anarchisme, les acteurs créent un climat de défoulement qui culmine par l'exaltation d'un libertinage effréné.

On ne s'étonne pas qu'à la fin des représentations les plus chaudes - comme celle de Grenade - le public, électrisé par le déroulement de la pièce, en soit venu à crier : «Lucifer, Lucifer, Lucifer»...[75].

Cette même doctrine et cette façon singulière de la répandre apparaissent aussi dans des pièces de théâtre comme Teledeum, Los Virtuosos de Fontainebleau et Visanteta de Favara[76].

Nous avons déjà mentionné l'immoralité propagée par Visanteta de Favara. Sur les deux autres pièces, citons quelques exemples d'irrévérences blasphématoires. Notre-Dame du Pilar est représentée par un homme moustachu, aux attitudes grotesques et jouant du tambourin. Un «garde civil» vise la tête d'un détenu avec un crucifix transformé en pistolet. Un «français» se déculotte et injurie insolemment les gloires de son pays: «de Jeanne d'Arc à Joseph Marie Flotats »[77]. Dans Teledeum, la Sainte Hostie est remplacée par le «ketchupchrist», morceau de pain azime couvert de sauce tomate. Un cardinal romain le vomit. Une soeur nord-américaine propose de faire une «bouchée» avec deux hosties et au milieu un «ketchupchrist». Un autre «gag» consiste à confondre le lavabo de la messe avec un WC[78]. L'auteur de Teledeum, Albert Boadella, énonce sa «règle de base» de création artistique : «Faire que le respectable se transforme en vil, le blanc en noir»[79]. Il reconnaît lui-même que son théâtre dégrade la culture et le public : «Nous sodomisons publiquement Juliette sur la scène, (...) nous sommes tous des marionnettes et des comédiens du mal vivre»[80].

 

c) Insultes à Dieu et satanisme «métaphorique» dans la presse quotidienne

Dans El Pais, des journalistes comme Francisco Umbral ne cessent de blasphémer, en utilisant un langage relativiste qui se prétend libre de tout préjugé. Umbral se réfère à Notre‑Dame de Covadonga comme le «fétiche portatif de Don Pélage». La Macarena, célèbre représentation de la Vierge des Douleurs à Séville, est pour lui la «mère vaguement incestueuse de la multitude»[81].

A côté de l'insulte à Dieu et à la Vierge Marie, il est tout à fait logique qu'apparaisse l'éloge du démon.

Manuel Vicent, toujours dans El Pais, fait de Satan le modèle du bonheur. Le remords pour ce que l'on considère une mauvaise action est pour lui la grande cause du malheur, dont Satan s'est libéré. Ainsi, «Belzébuth en flammes» se transforme en modèle de lucidité pour les hommes et l'enfer en «la grande école de libération». «Désirer le feu éternel comme une source de plaisir» (sic) est «la forme la plus moderne du salut»[82]. Les enthousiastes de la «modernité» soupçonnaient-ils qu'elle puisse inclure le désir de l'enfer ?

Francisco Nieva, dans ABC, fait l'éloge du démon, «condamné à souffrir injustement» pour avoir offert «des plaisirs concrets, passionnés et des options totalisantes. Pratiquement, ce que nous avons de mieux, c'est au démon que nous le devons». En même temps, il se moque de «l'ange changeant qui va me trahir selon ce que lui soufflera le vent fou de Dieu».

Le démon – qui, dans cette optique, est la grande victime de l'injustice et l'opprimé de la Création – mériterait l'hommage des hommes, eux-mêmes victimes d'injustices et d'oppressions : «Ah, comme nous l'avons laissé seul, le démon ! (...) à qui, moi, – sachant bien pourquoi – je présente ici mes respects», conclut Nieva[83].

Dans cette ambiance, comment se surprendre qu'il y ait des congrès de sorcellerie comme ceux de La Corogne ou de Pampelune, tous deux avec un large soutien officiel et la propagande de la presse quotidienne ! Au congrès de Pampelune, le professeur Barruezo a décrit les sabbats sous une forme attrayante pour l'homme contemporain : de simples réunions festives qui se terminaient en orgies sexuelles par l'usage de drogues hallucinogènes[84].

Mais nous verrons que ce n'est pas seulement par le moyen de la promotion officielle ou par les pages de la presse que s'installent dans la vie quotidienne des Espagnols le blasphème et même l'éloge des «qualités» sataniques.

 

d) La ronde incessante des profanations et des vols sacrilèges

Ces dernières années, les profanations et vols sacrilèges se sont succédés à travers le pays. Beaucoup de tabernacles ont été profanés et, dans presque toutes les villes, des églises ont été saccagées, des statues volées ou détruites.

Voici quelques exemples particulièrement symboliques :

La statue de Notre-Dame du Pilar dressée au sommet du Pic d'Aneto, point culminant des Pyrénées, a été retrouvée un jour décapitée. Les auteurs : inconnus...[85] Une statue de Saint François-Xavier, qui dominait le point le plus élevé de la Navarre, à 2.500 mètres, a été aussi décapitée. Les auteurs: également inconnus[86]. A Pampelune, des auteurs inconnus, une fois encore, ont endommagé et barbouillé de peinture plusieurs figures du groupe sculptural situé à un croisement de l'avenue Saint Ignace et qui représente le fondateur des Jésuites, blessé lors de sa dernière bataille comme officier, où il a défendu héroïquement la capitale navarraise.

A Orihuela (Alicante), la Croix de Muela - de 35 mètres de haut avec une traverse horizontale de 25 mètres -, qui dominait la montagne de ce nom depuis plus de quarante ans, a été sciée et abattue[87]. A Vitoria, une procession athée, qui prend des airs de savant rituel satanique, se déroule les Vendredis Saints, avec blasphèmes, insultes à l'Eglise et brûlements de croix[88]. Les profanations, vols, incendies ou destructions de statues, de tableaux, de vases sacrés et d'édifices de grande valeur artistique et historique se comptent par centaines.

Les attentats sacrilèges contre le Saint-Sacrement sont d'une gravité incomparablement plus grande. Ces dernières années, ces attentats ont proliféré, mais nous n'en donnerons que trois exemples. Dans l'église SaintEtienne, à Ségovie, des inconnus ont arraché le tabernacle du maître-autel et jeté les hosties à la rue. «Ce ne fut pas pour voler - a commenté le curé, M. Bartolomé Ramirez , [car] il y a ici des calices et des oeuvres d'art importantes»[89]. A Huesca, dans l'église Saint-Laurent, les Saintes Espèces ont disparu. Le curé de la paroisse craint qu'on les ait utilisées «dans quelque espèce de messe noire»[90]. A Majorque, deux ciboires ont disparu de l'église St Ferriol, avec toutes les hosties consacrées[91]. De pareils faits ne sont habituellement pas suivis d'actes de réparation proportionnés.

Ces sacrilèges et profanations se produisent habituellement dans une atmosphère ambiguë et confuse. Tel vol n'aura-t-il pas été le fait d'un voleur ordinaire ? Telle profanation ne sera-t-elle pas l'oeuvre d'un ivrogne ou d'un groupe punk drogué ? La façon peu claire avec laquelle ces événements se présentent crée dans le public des difficultés pour les juger, et sans un jugement clair il ne peut y avoir de réaction efficace.

Considérés dans leur ensemble, les actes de vandalisme impie semblent vouloir représenter à nos yeux un éclatement exalté et brutal, une explosion de libération qui surgit spontanément et irrésistiblement contre la Religion, ses dogmes, son culte et sa pérenne sacralité. Un peu comme l'effet du terrorisme basque sur le patriotisme espagnol.

L'homme nouveau en gestation dans une Espagne «libérée» de son passé se manifeste ici dans ses éléments les plus instinctivement rebelles et marginaux.

 

e) Mesures officielles de désacralisation

Au pouvoir, le PSOE complète sa campagne de déchristianisation de l'Espagne, en introduisant peu à peu le laïcisme total. La Religion disparaît progressivement des actes officiels. Avec les réformes du Règlement des Honneurs Militaires en 1984, le Très Saint Sacrement a cessé de mériter les honneurs suprêmes. Les honneurs qu'on lui rend sont maintenant inférieurs à ceux que l'on prête au drapeau, au Roi, au Prince des Asturies, au ministre de la Défense et, a fortiori, au chef du Gouvernement et au vice-président. Les honneurs rendus à la Très Sainte Vierge et aux Saints ont été abolis[92].

Les autonomies de Catalogne, Valence, Murcie et Castille-La Manche ont décidé de supprimer de leurs calendriers officiels la fête de l'Apôtre Saint Jacques, patron de l'Espagne[93] (140). A partir de 1984, le Jeudi Saint est devenu un jour ouvrable en Catalogne, Valence, Pays Basque, Estrémadure et Baléares. De même, le 19 mars, fête de Saint Joseph a été déclaré jour ouvrable par les communautés autonomes des deux Castilles et d'Andalousie[94]. Par ordre de la présidence du Gouvernement, la formule traditionnelle «Dieu vous garde de longues années»[95] a été éliminée du protocole des documents officiels.

La répétition continuelle des sacrilèges anonymes, des blasphèmes dans les moyens d'information, ainsi que les mesures officielles de désacralisation de la vie publique, tout cela déprime et assomme. Mais, cela crée aussi une habitude. Avec l'habitude, on prépare l'esprit de la majorité des Espagnols à tolérer à l'avenir des attentats beaucoup plus radicaux et audacieux. Dans la vie quotidienne, la révolution avance...

    

L’autogestion, utopie commune aux socialistes, communistes et anarchistes

L'autogestion se fonde sur les principes de la trilogie «Liberté, Egalité, Fraternité». Le socialisme autogestionnaire ne se contente pas de les appliquer au domaine politique. Il veut les étendre à tous les domaines : économique, social, familial, éducatif, etc... Cette extension constituerait un approfondissement de la démocratie et sa réalisation intégrale.

«La stratégie pour parvenir au socialisme – affirme le PSOE – consiste à élargir et approfondir la démocratie» (Résolution politique du Congrès extraordinaire, septembre 1979, p. 7).

Le XXVIIIè Congrès, plus didactique, ajoute : «Il faut élargir la démocratie pour rendre chaque fois plus grands les domaines du pouvoir social aux mains de la décision populaire, en les retirant à l’appropriation privée ; pour étendre chaque fois plus les conditions sociales suffisantes à un égal exercice de la liberté. Il faut approfondir la démocratie pour engendrer de nouvelles formes de participation du peuple à la direction de la société et de l'Etat, sur la voie du socialisme et de l'autogestion» (PSOE, «Resolucion Politica», in Resoluciones - XXVIII Congreso del PSOE, 1979, p. 7).

Le XXXIe Congrès du PSOE, de janvier 1988, est revenu sur la question dans ses résolutions : «Le socialisme n'est pas autre chose que l'approfondissement de la démocratie, moyennant son extension à tous les domaines de la vie collective, depuis l’école jusqu'à l’entreprise. Ce projet requiert la redistribution du pouvoir social et économique, ainsi que l’extension des mécanismes de participation et d'information. En ce qui concerne la participation des travailleurs dans les entreprises, nous chercherons à mettre en place progressivement des formes de participation des travailleurs dans les organes de direction et de surveillance des entreprises» («Resoluciones – XXXI Congreso del PSOE», art. 1.5.7, in El Socialista, 31/1/88).

 

La cogestion, premier pas vers l'autogestion

La cogestion repose sur l'idée que si on intéresse l'ouvrier à l'égal du patron à la marche de l'entreprise, on atteint un degré idéal de concorde sociale et de progrès économique. Il n'y aura pas alors de différences entre patrons et ouvriers, car tous seront à la fois associés et travailleurs.

Voyant que dans une entreprise ainsi conçue les différences subsisteront, les théoriciens socialistes européens pensent les éliminer au moyen d'un système de rotation des taches. Considérant que l'entreprise doit correspondre non seulement à l'intérêt de ses membres, mais aussi aux besoins des consommateurs, des associations de quartier, etc... ces théoriciens proposent de faire participer aussi ces derniers à la direction.

De la cogestion, on passerait à l'autogestion, car il s'agit des deux phases successives de l'application d'un même principe. Le préfixe co indique une gestion en commun des propriétaires et des ouvriers. Le préfixe auto signifie qu'il n'existe plus de patron et que le pouvoir réside égalitairement chez tous les travailleurs de l'entreprise. Dans la phase finale du processus, néanmoins, les travailleurs devront partager ce pouvoir avec les consommateurs, les voisins, etc... Il ne restera plus que la communauté.

 

Une dictature à la soviétique, en pire

Les expériences volontaires d'autogestion réalisées dans les pays libres montrent que le contrôle patronal se trouve remplacé par un autre, véritablement oppressif : «la tyrannie du groupe, l’affrontement continuel et l'auto-exploitation». Dans ce régime, «chacun est en permanence sous le regard d'autrui, à travers le travail, les réunions, les relations amicales. Déviance interdire». C'est ce qu'affirme Muriel Ray en commentant les études de spécialistes en la matière (Le Monde, 10/1/82).

En effet, dans les grandes communautés, aussi totalitaires qu'elles soient, les individus trouvent encore un certain espace de liberté, tandis que dans les petites communautés autogestionnaires personne ne jouit d'une vie privée et la surveillance sur chacun est beaucoup plus effective. La communauté de biens et l'absence de libre initiative continuent d'exister, parce que chaque unité est un petit soviet, où l'activité économique est dirigée avec main de fer et oeil de lynx par une minorité qui exerce le pouvoir. Le système communiste, loin de se libéraliser, arrivera ainsi à sa pleine réalisation.

En outre, l'ouvrier ne serait vraiment libre que s'il pouvait disposer de la partie de l'entreprise qui lui revienne. Il n'en sera rien et il se trouvera ainsi attaché à l'entreprise. Comme celle-ci sera contrôlée par des lois étatiques, les tentacules de l'Etat totalitaire continueront à le dominer. Si ce n'est directement l’Etat, ce seront les fédérations d'unités autogestionnaires qui se chargeront de le diriger...

Voilà où nous aura conduits cette fameuse démocratie intégrale. On pense au vieux dicton : «Ce que le démon promet, c'est précisément ce qu'il va nous enlever».

 

Perestroika : la Russie va adopter l'autogestion

Les maîtres du Kremlin n'ont jamais caché que leur objectif final est l'autogestion, dont la mise en pratique a seulement été repoussée pour des raisons tactiques. Dans le préambule de la Constitution russe, on peut lire : «L'objectif suprême de l'État soviétique est d’édifier la société sans classes, dans laquelle se développera l'autogestion sociale communiste». Gorbatchev considère la perestroika comme la façon la plus rapide d'atteindre cet objectif : «Perestroika signifie initiative de masse. C'est le développement complet de la démocratie, l'autogestion socialiste» (Mikhail Gorbatchev, Perestroika - New Thinking for our country and the World, Harper & Row, New York, 1987, pp. 28, 29, 31).

Dans une autre occasion, il a ajouté : «La perestroika est une étape historique dans l’avancée progressive de notre société. (...) Le problème consiste à favoriser l'autogestion (...) Le développement de l’autogestion se fera principalement à travers les Soviets» (Mikhail Gorbatchev, Octobre et la perestroika, la révolution continue, Ed. de l'Agence de Presse Novosti, Moscou, 1987, pp. 40, 42, 43).

Aux insouciants qui, par ignorance ou superficialité, imaginent qu'avec la perestroika le Kremlin prend ses distances avec les objectifs communistes, Gorbatchev lui-même adresse ce rappel à l'ordre : «pour mettre un terme à ces rumeurs et à ces spéculations, qui se multiplient à l'Ouest, j’aimerais signaler une fois de plus que nous conduisons toutes nos réformes en conformité avec la voie socialiste. (...) Ceux qui espèrent que nous allons nous éloigner de la voie socialiste seront profondément déçus. Chaque élément du programme de la perestroika - et le programme dans son ensemble - se fonde entièrement sur l'idée qu'il faut davantage de socialisme, davantage de démocratie (...) Tout espoir que nous puissions nous mettre à bâtir une société différente, non socialiste, et passer dans l'autre camp, est irréaliste et dérisoire. Ceux qui, à l'Ouest, s'attendent à nous voir abandonner le socialisme en seront pour leurs frais. Il est grand temps qu'ils le comprennent et, plus important, qu'ils partent de ce constat dans leurs relations pratiques avec l’Union soviétique» (M. Gorbachev, Perestroika, op. cit. pp. 36-37).

La perestroika est présentée comme une évolution de la Russie vers la liberté, l'autogestion en Occident comme une marche vers l'égalité. Illusion de plus de liberté en Russie, où il y a déjà l'égalité, menace de plus d'égalité en Occident, où il y a déjà la liberté... Les deux blocs chemineraient ainsi vers la liberté et l'égalité...

Ainsi se dessine une convergence mondiale vers le régime autogestionnaire.


NOTES

[1] ABC, 8/8/86 et 23/10/83; El Alcazar, 30/7/83, 30/10/83 et 25/7/84.

[2] Les déclarations de Mgr Infantes Florido, évêque de Cordoue, en sont malheureusement un exemple : «Nos vieilles discordes, les pages violentes de notre Histoire, notre récent passé de lutte fratricide, reçoivent de la Mosquée-Cathédrale de Cordoue le signe de nous engager dans une tâche commune et fraternelle pour la convivance et l’unité de l'Espagne» (ABC, 29/5/86).

[3] El Pais, 92/85.

[4] A propos du caractère de traître de Guillaume le Taciturne, voir par exemple William Thomas Walsh, Felipe II, Espasa Calpe, Madrid, 1951, 4ème éd., p. 453. Cet historien nord-américain l'accuse de jouer un «double et ignominieux rôle», de «traître à Philippe, auquel il avait juré fidélité, et traître à tout le monde chrétien», pour avoir cherché à ce que la Turquie déclare la guerre à l'Espagne. Sur la légitimité de l'action de Philippe II, voir Ricardo Garcia Villoslada, S.J. et Bernardino Llorca, S.J., Historia de la Iglesia Catolica - III Edad Nueva, BAC, Madrid, 1960, pp. 912-916 et Ludovico Pastor, Historia de los Papas, Ed. Gustavo Gili, Barcelone, vol. XVIII, pp. 62-90 et vol. XIX, pp. 392-411.

[5] ABC, 9/10/85.

[6] Apud Bx. Ezequiel Moreno y Diaz, Cartas Pastorales, Circulares y otros escritos, Imprenta de la Hija de Gomez Fuentenebro, Madrid, 1908, p. 477.

[7] ABC, 9/10/85.

[8] Ibidem.

[9] ABC, 12/10/84.

[10] La Vanguardia, 18/1/87.

[11] ABC, 22/7/87.

[12] Apud Henri Arvon, Le Gauchisme, PUF, 1974, p. 68.

[13] En 1979, le PSOE a adopté la résolution suivante : « L'objectif des socialistes doit être d’obtenir un changement substantiel (...) dans les relations à l'intérieur de la famille. Pour établir solidement la démocratie (...) on devra promouvoir des changements dans les attitudes sociales qui font perdurer les pratiques de l'autoritarisme, de l'inégalité et de l'exclusion au sein de la famille » (28e Congrès du PSOE, p. 16).

[14] Auparavant, le PSOE avait aidé le gouvernement centriste (UCD) à démolir d'autres fondements institutionnels de la famille monogamique et indissoluble. L'adultère et le concubinat ont été dépénalisés par la loi du 26/5/78 (BOE, 38/5/78). L'article 416 du Code Civil a été réformé par la loi 45/78 du 7/10/78 (BOE, 11/10/78), autorisant la commercialisation et la publicité des contraceptifs. L'égalisation des droits entre enfants légitimes et illégitimes a été consacrée par la loi du 13 mai 1981, qui a modifié les art. 108 et suivants du Code Civil. La loi du 7/7/81 a modifié l'art. 53 du Code Civil, donnant au mari et à la femme les mêmes droits et devoirs. La même loi a aussi modifié les art. 85-89 du même Code, en légalisant le divorce.

[15] PSOE, Resoluciones – XXVIII Congreso del PSOE, 1979, p. 18.

[16] PSOE, Resoluciones - XXIX Congreso del PSOE, 1981, pp. 232-233.

[17] Maria José Ragué, Proceso a la familia española, Gedisa, Barcelona, 1977, p. 35. Lidia Falcon, de l'Organisation Féministe Révolutionnaire, a affirmé : «La famille sera la dernière chose à détruire. Le mouvement féministe avance et les femmes s'y prépareront, en se conscientisant chaque fois plus de leur situation. Les femmes s'uniront à ce mouvement féministe et seront des militantes féministes (...) et elles détruiront leur famille» (ibid., p. 31).

[18] PSOE, Resoluciones - XXVII Congreso del PSOE, 1979, pp. 16-17.

[19] Ibid., p. 16.

[20] Cf. Comentario Sociologico, juil-déc. 1984, p. 132. Voir aussi la lettre de Maria Femanda Prado, présidente de la Commission Enseignement de l'A.P. de Barcelone, El Pais, 27/10/84.

[21] El Pais, 25/6/85.

[22] Dans le cahier Centros Asesores de la Mujer, édité par le Secrétariat Fédéral de Politique Sectorielle du PSOE, on explique les objectifs de ces centres : «S’insérer dans la communauté vicinale pour impulsionner les valeurs de la culture féministe et leur progressive prise en main par celles pour qui nous luttons pour une nouvelle société socialiste.» Ils auront un «rôle de conscientisation» pour être «un instrument de la vie quotidienne des personnes» (pp. 8 et 9).

[23] PSOE, Resoluciones - XXIX Congreso del PSOE, 1981, p. 235.

[24] Ministère de l'Education et de la Science, Proyecto para la reforma de la Enseñanza, 1987, p. 21.

[25] Apud Javier Tussel, «Maraval no sabe», in Ya, 14/10/83.

[26] Ministère de l'Education et de la Science, op.cit., p. 23.

[27] Ibidem.

[28] PSOE, XXVIIe Congrès, p. 200.

[29] Loi Organique, 3/7/85 (BOE, 4/7/85), préambule et art. 39, 42, 47, 48, 49, 51 et 56.

[30] Ya, 19/3/87.

[31] Renovacion, juillet-août 1977, p. 23.

[32] Cf. Renovacion, n°s 3 et 4, 27/9/77, p. 45.

[33] El Publico, octobre 1986, pp. 45-46.

[34] Mairie de Madrid - Cours Municipal de Culture, Première Semaine de l'Erotisme, Madrid, juin 1984.

[35] El Pais, 3/7/86.

[36] Cf. Ya, 23/11/84; ABC, 10/1/85.

[37] Villa de Madrid, 15/6/84.

[38] ABC, 27/6/86; El Pais, 10/8/86, 5/9/86 et 3/7/87; Ya, 2/8/86.

[39] El Pais, 23/7/86.

[40] La position adoptée par les organes de presse dits modérés facilite son acceptation. ABC, dans sa colonne éditoriale, commente ainsi la généralisation du topless : «Les modes sont les modes, ni bonnes, ni mauvaises, ni pieuses, ni peccamineuses. Elles sont simplement des modes, qui rencontrent toujours une résistance initiale et qui bientôt s’imposent (...) Au scandale de beaucoup, il s'est imposé en Espagne, comme dans le reste de l'Europe, le fameux 'topless', aussi bien à la plage qu'à la piscine. C'est la nouvelle mode (...) Nous ne sommes ni pour ni contre» (17/6/84). Un chroniqueur important de ce même journal, Antonio Burgos, n'hésite pas à parler de «l'avancée sociale, culturelle et même, permettez-moi de le dire, idéologique et religieuse, que marque justement pour nous le 'topless'». II ajoute : «Avec tout le respect pour ces saints hommes, j'ose à peine imaginer ce qu'auraient dit les cardinaux Segura ou Pildain s'ils avaient connu cette époque. Non, l'épiscopat aujourd'hui ne se soucie plus de ces questions. L'Espagne non plus (...) Progresser, c'est perdre la capacité de s'étonner» (ABC, 22/7/85).

[41] PSOE, Resoluciones - XXIX Congreso del PSOE, 1981, pp . 217-218.

[42] Cf. Liberacion, 15/12/84.

[43] Ibid., 6/12/84.

[44] Cf. El Pais, 6 et 8/2/87.

[45] El Pais semanal, 2/3/86.

[46] La résolution du XXIXème Congrès du PSOE sur les «mouvements sociaux» affirme : «Les organisations de défense des consommateurs, de pacifistes, d'écologie, féministes, associations de quartier, d'homosexuels (...) associations de droits de l'homme, etc. (...), constituent diverses formes de lutte revendicative. (...) Elles cherchent leur solution dans un nouveau type de société et dans la perspective d'une révolution de la vie quotidienne. Elles apparaissent comme des mouvements dont les limites ne sont pas données par la lutte revendicative. Elles se situent dans le cadre de transformations profondes et radicales de la société». Le PSOE doit mener une politique de soutien aux mouvements sociaux et «s'engage à les impulsionner et à les développer» (pp. 201, 203, 205). Lors du Congrès Extraordinaire de 1979, le PSOE s'est engagé à favoriser «la participation populaire et le protagonisme des collectifs marginalisés et subordonnés», dont celui des homosexuels (p. 16).

[47] El Pais, 7/5/86.

[48] Manuel Vincent fait l'éloge du noir dégradé par la barbarie tribale. Mais il est évident qu'il ne verrait pas avec sympathie celui qui, sanctifié par la pratique des Commandements de Dieu, arriverait à un haut degré de civilisation. L'Eglise, bien au contraire, vénère comme saints d'innombrables noirs.

[49] Alfonso Guerra a déclaré aux dirigeants et intellectuels du PSOE, lors de la Ière Rencontre de Javea, en septembre 1985: «Le marxisme a cessé d'être un texte idéologique clair (...) De même ont cessé de l'être les conceptions économiques collectivistes. Je me réfère aux nationalisations» (Alfonso Guerra y otros, El futuro del socialismo, Ed. Sistema, Madrid, 1986, p. 14).

[50] R.G. Cotarelo, «le Modèle de Société», in Alfonso Guerra y otros, El futuro del socialismo, p. 169.

[51] Ignacio Sotelo, «Socialisme et Culture», in PSOE, Propuestas Culturales, Mañana Ed., Madrid, 1978, p. 28.

[52] «Si nous passons à un deuxième niveau, qui serait la réflexion et la stratégie pour incorporer la protection des droits fondamentaux dans les perspectives socialistes, cela suppose à mon sens une double tâche : d'abord une tâche pour défondamentaliser et écarter certains droits (...) comme le droit de propriété et les libertés de commerce ou d'industrie. A travers cette tâche, et au rythme où nos forces stratégiquement étudiées le permettront, il faudrait aller progressivement vers une propriété sociale ou étatique des moyens de production» (Gregorio Peces-Barba, «Socialisme et Etat de Droit», in Felipe Gonzalez y otros, Socialismo es libertad - Escuela de Verano del PSOE, 1976, Edicusa, Madrid, 1976, pp. 124-125).

[53] Comentario sociologico, juil-déc. 1984, pp. 699-700.

[54] Sur ce point également, le socialisme contredit frontalement la doctrine sociale catholique, qui affirme la prépondérance du caractère personnel de la propriété : «Le droit de propriété, pour l’individu et pour la famille, découle immédiatement de la nature de la personne, droit, par conséquent, lié à la dignité de la personne humaine, qui comporte, certes, des obligations sociales, mais qui ne se réduit pas à une fonction sociale» (Pie XII, «Radiomessage au Katholikentag de Vienne», 14/9/52, Discorsi e Radiomessagi, vol. XIV, p. 314).

[55] Sur la réforme agraire andalouse, voir par exemple la loi du 3/7/84, art. 15, 19, 21, 28, 36-39, 42-44, et l'étude de José Maria Sumpsi, «Structures agraires et politique de réforme», in Pensamiento Iberoamericano, n° 8, juil-déc. 1985, pp. 247, 248, 255-257. Sur la réforme agraire en Estrémadure, voir la loi 1/1986 du 2 mai sur l'élevage, art. 13-25, 30, annexe II; loi 3/1987 sur les terres d'irrigation, art. 10-12, 24-29. Sur la réforme agraire aragonnaise, voir la loi 3/1987, du 10 mai, art. 4-7, 16, 19, 22, 23.

[56] Cf. loi 29/1985, art. 50, 57. Dispositions Transitoires n° 1, 2 et 3.

[57] PSOE, Resolucion Politica del Congreso Extraordinario, 28-29/9/79, p. 1-2.

[58] Cinco Dias, 17/1/86; El Pais, 14/1/86.

[59] Tecnicas y Cuadros, février 1986, p. 13.

[60] TFP-Covadonga n'a jamais vu dans le régionalisme en tant que tel un facteur de démembrement de l'Espagne, mais au contraire une condition de l'organicité de l'unité nationale. Une nation qui prétendrait établir son unité par l'anéantissement de ses particularités régionales attenterait contre la source même de sa vitalité.

[61] Les résolutions du XXVIlème Congrès du PSOE, de décembre 1976, qui ont servi de programme officiel pour la participation socialiste à l'élaboration de la Constitution, affirment : «Le PSOE, dans sa perspective autogestionnaire, estime nécessaire de mettre en pratique une stratégie tendant à préfigurer les institutions politiques qui serviront à gérer la société socialiste. Dans ce sens, la lutte pour les libertés des nationalités et régions s'insère dans notre politique pour l'autogestion de la société (...) Le PSOE préconise l'instauration d’une République fédérale, intégrée par tous les peuples de l'Etat espagnol (...) dans un cadre constitutionnel ouvert» (p. 128).

[62] Apud Angel Palomino, «La vida cotidiana», in Rafael Abella y otros, España diez anos después de Franco (1975-1985), Planeta, Barcelone, 1986, p. 201.

[63] Cf. Parti Nationaliste Basque (PNV), Planteamientos Politico, Socio-Economico y Cultural, Documentos de la Asamblea Nacional, mars 1977, pp. 11, 13, 53, 54. Le PNV prévient que «le peuple basque ne doit pas succomber à la tentation de vouloir se donner une structure étatique caduque et dépassée», mais il doit lutter «pour un Etat basque autonome qui soit une entité politique progressive», avec des «modèles de production de plus en plus démocratiques et participatifs» (op.cit., pp. 47, 49).

[64] La Vanguardia, 9/5/87.

[65] Cf. El Alcazar, 10/8/86; El Pais, 13/8/86; Ya, 9/8/86 et 14/8/86.

[66] ABC, 9/3/86.

[67] Leviatán, n° 28, 1987, pp. 54-57.

[68] ABC, 26/2/84.

[69] Politique aujourd'hui, numéro hors-série, 1985, pp. 43-45. Corroborant les affirmations de Manuel Azcarate, Mano Onaindia, secrétaire général de Euskadiko Ezquerra (parti séparatiste basque), s'est prononcé en faveur de la constitution d'une Europe des peuples, «une nation européenne où tous nous ayons notre place», qui ne finisse pas au «rideau de fer» (Diario 16, 27/5/87).

[70] ABC, 9/7/86; 12/7/86; 16/7/86; El Alcazar, 9/7/86; 17/6/86; 22/7/86; El Pais, 9/7/86; Ya, 17/7/86.

[71] La troupe de théâtre Els Comediants, qui a écrit et joué la pièce Di-monis, a reçu le Prix National de Théâtre de 1983, décerné par le Ministère de la Culture (cf. El Alcazar, 18/5/84). Par ailleurs, de nombreuses municipalités et organismes publics lui accordent soutien logistique et financement.

[72] El Publico, octobre 1983, pp. 5 et suivantes.

[73] Selon un enregistrement sur bande magnétique effectué durant une représentation à Grenade.

[74] Apud Ya, 15/5/84.

[75] Cf. note 73.

[76] Cf. ABC, 31/5/87; El Alcazar, 10/3/87; El Dia, 6/8/86; El Pais, 28 et 30/10/85; 6 et 8/8/86; El Publico, octobre 1986, pp. 45-47.

[77] El Pais, 28 et 30/10/85.

[78] ABC, 22/4/84.

[79] Ibid.

[80] Cuadernos de El Publico, n° 4, mai 1985, p. 71.

[81] El Pais, 2/6/86.

[82] El Pais, 1/7/86.

[83] ABC, 4/5/86.

[84] ABC, 27/9/86, 21 et 31/10/86, 2/8 et 11/11/86.

[85] El Alcazar, 21/8/86; El Dia, 19, 21 et 26/8/86; Iglesia en Zaragoza, 12/10/86.

[86] El Alcazar, 14/8/85.

[87] ABC, 4/1/85.

[88] El Alcazar, 13/4/85; Catalunya Cristiana, 21 à 27/4/85.

[89] El Alcazar, 13/4/84.

[90] El Dia, 17/11/84.

[91] El Alcazar, 4/5/85.

[92] BOE, 4/5/84; El Pais, 20/11/84. Voir aussi BOE, 3 et 4/5/83.

[93] ABC, 23/10/83; El Alcazar, 30/10/83 et 25/7/84.

[94] ABC, 20/3/84 et I2/4/84; El Alcazar, 20/3/84; El Pais, 17/3/84 et 20/3/84.

[95] ABC, 18/6/86 et 23/7/86.


 

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